Les diplômés chômeurs… au travail

Written by on 12 mars 2012 in Travailler - Commentaires fermés

Titulaires d’une maîtrise ou d’un doctorat, 220 000 diplômés tunisiens sont au chômage. L’Union des diplômés chômeurs (UDC) tente, depuis 2006, de lutter contre ce fléau.

Salem Ayari, une maîtrise en langue arabe, un master en sociologie, et chômeur. (photos CFJ/ T.C.)

Salem Ayari est un chômeur surdiplômé : une maîtrise en langue arabe et un master en sociologie. Alors, pour ne pas rester inactif, il porte une casquette supplémentaire : coordinateur national de l’Union des diplômés chômeurs (UDC).

Créé en mai 2006, « pour lutter en faveur du droit du travail, contre la corruption de l’Etat de Ben Ali et, surtout, pour donner des idées afin de diminuer le taux de chômage tunisien », l’UDC compte aujourd’hui 24 bureaux régionaux – un par gouvernorat – et 10 000 adhérents. Preuve que la cause fédère. Il faut dire que sur les 740 000 chômeurs que compte la Tunisie, 220 000 sont diplômés (dont 90 000 ont entre 35 et 48 ans). « Après la Révolution, le nombre a explosé, précise Salem Ayari. Et ça va empirer : en juillet prochain, 65 000 chômeurs supplémentaires vont sortir de l’Université. »

Face à un gouvernement « qui donne des chiffres mais pas de réponses », l’UDC lutte pour faire entendre ses propositions. Son cheval de bataille : qu’une indemnité soit versée à tous les chômeurs. « On réclame au moins 300 dinars par mois (150 euros), mais pas uniquement pour les diplômés, précise Salem Ayari. Il faut donner l’avantage à ceux qui ont plus de cinq ans de chômage. »

L’UDC réclame également « que l’Etat pousse le secteur privé à embaucher et qu’il facilite la création d’entreprises pour les jeunes », ajoute Belkacem Ben Abdallah, membre du bureau exécutif de l’Union. En février, l’UDC a entamé des discussions sur l’emploi dans les bureaux régionaux avec des associations, des partis politiques et d’autres acteurs de la société civile. Début avril, c’est à Tunis que se tiendra la discussion nationale. « Il faut stabiliser l’UDC dans la vie politique et sociale : on doit viser l’Histoire », conclut-il.

 Rayés des concours nationaux

Ambitieux programme pour une association qui a vécu cinq ans avec les intimidations du régime de Ben Ali. « En 2006, lorsqu’on a voulu fonder l’UDC, l’administration a refusé notre dépôt légal », se souvient Belkacem Ben Abdallah. « Avant, on n’avait pas le droit de parler, ni de faire des réunions ou des sit-in. Des membres de l’UDC ont été agressés, emprisonnés et éliminés des concours nationaux », rappelle Salem Ayari, qui n’a réussi à obtenir son visa qu’en février 2011. On a le droit désormais de parler de la face cachée du miracle tunisien.

Tiphaine CRÉZÉ

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